Les disparus et ne pas savoir.

Selon certaines conclusions des différentes commissions d'enquête sur les disparitions de femmes autochtones. Les services policiers seraient à blâmer pour un certain laxisme et les gouvernements taxés de génocide, ce qui dans les faits semble un peu exagéré. J'aurais préféré les termes ignorance, indifférence, incompétence, car nous en sommes plus près que du génocide. Comme mon domaine est policier, je vais m'y attarder. 
Depuis des années, les différents services de polices de l'Ouest du pays ont négligés les disparitions de femmes autochtones. Les motifs les plus récurant étant que plusieurs faisaient de la prostitution et se déplaçaient beaucoup ou, elles étaient des faiseuses de trouble quand elles étaient ivres et qu'elles reviendraient bien un jour ou l'autre. Alors aux cours des ans, il s'est établi une façon de faire ou l'indifférence devint la norme. Bien sûr, en tant qu'êtres humains et flics, il aurait dû être du devoir de tous ces policiers de travailler pour retracer ces femmes qui disparaissaient soudainement et que l'on ne retraçait plus. Il en va pour toutes les disparitions: elles se doivent d'être d'égale importance, sans préjugés, sans idées négatives, sans suffisance ou visions préconçues. 
Le capitaine détective Gimkas, mon vieux professeur de criminalistique répétait sans cesse : questionnez-vous sur le jugement que vous portez. Demandez-vous si votre vision des choses est la bonne. Et quand vous croyez avoir raison, reposez-vous encore la question. 

Le problème est que les policiers se doivent de régler ce qui est réglable et comme des cas, ils en ont à la tonne, ils font donc le choix de la rapidité. Les enquêtes de longue haleine se retrouvent dans la pile poussiéreuse. Et quand des sections ''cold case'' se forment, les gens qui auraient pu avoir certaines informations sont elles aussi passées à autre chose. 
Les personnes qui disparaissent laissent des pères, des mères, des frères et des sœurs et des enfants derrière elles. La tristesse, l'inquiétude, l'incompréhension, le désespoir deviennent le lot quotidien de ceux qui attendent une réponse fut elle tragique. Vous espérez même en plein désespoir, car c'est tout ce qu'il vous reste. Et si en surplus, vous sentez qu'on ne fait pas tout pour retracer l'être cher, il devient de plus en plus difficile de garder un tant soit peu le lien de confiance. 
À l'heure du Web et des communications rapides, il serait bien que les corps policiers se parlent et pas dans une semaine. Pour cela, il faut des équipes rodées et formées. Des équipes ayant à cœur la vie des gens, même quand ces gens sont pour vous des gêneurs. Oui, il arrive que des filles soient ivres et agressives, qu'elles fassent la pute ou qu'elles s'enfuient tout simplement. Ce n'est pas aux policiers de juger de l'importance ou la gravité. Le travail est de retracer les portés disparus.
Dans les années 80, je travaillais en collaboration avec les centres Shawbridge ( jeunes délinquants ) Mon Ami Marty Croitoru policier spécial mandaté par l'organisme, venait en permanence demander mon assistance pour retracer des jeunes fugueurs et fugueuses qui pour la majorité venaient se prostituer dans le centre-ville. Alors, nous avions notre réseau d'informateurs qui souvent amenaient les filles chez eux et nous appelaient pour qu'on les ramasse. Ils étaient payés pour nous aider et nous ramenions ainsi plus d'une centaine de jeunes par année. Nous arpentions les stations de métro, les arcades, les parcs et nos sources étaient des prostituées, des Skinhead, des macs, des tenanciers de bar. Nous étions présents dans la rue. Cette façon de faire s'est éteinte avec notre départ. Un de mes policiers de l'époque, John Parker, aurait pu vous nommer 95% des Innus du centre-ville. Il connaissait tout le monde et ceux qui disparaissaient pour quelques jours ou semaines John cherchait immédiatement à savoir ce qui en était auprès des connaissances. 
C'est peut-être ce qui manque dans cette police dite de quartier, la proximité qui doit se créer avec les gens de cette société. 
Tout ce que je peux espérer, c'est que ces commissions et ses rapports servent à quelque chose. Sinon, nous dépensons beaucoup d'argent pour rien. 

Commentaires